« Je ne supporte pas les bleus » : le coup qui marque

Buzzman oblige, le buzz est au rendez-vous d’un grand coup de pub contre les violences conjugales pour l’association Elle’s Imagine’nt.

Certains ont salué l’ingéniosité créative (48 % de « génial » le 8 juin sur Stratégies ), d’autres ont trouvé la vidéo un peu longue (mais il faut bien donner la parole à tous les pipoles), d’autres enfin reprochent l’usage d’un ton un peu trop léger pour un sujet aussi grave.

Le ton. Toute la question est là.

Ne parler que de « bleus » pour les violences conjugales, n’est-ce pas rendre le sujet moins noir qu’il ne le faudrait ? Car en France, selon l’Insee, on estime que 223 000 femmes âgées de 18 à 75 ans sont victimes de violences graves de la part de leur ancien ou actuel partenaire, et qu’une femme décède tous les 3 jours sous les coups de son conjoint, compagnon ou ex-compagnon. Ce qui est autrement plus grave qu’un bleu.

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Certes, depuis des années, les campagnes de sensibilisation se sont succédées. Souvent choc et dramatiques, parfois culpabilisantes, mais toujours graves dans leur ton. Celle-ci fait exception. Son jeu de mots, lié à l’actualité, est un sacré euphémisme. D’où la polémique et les critiques : non, la violence ne se résume pas à « quelques bleus ».

On peut néanmoins se demander quel impact ont eu les campagnes précédentes. A-t-on constaté une notable diminution de la violence? Davantage de paix dans les ménages ? On peut en douter. On relatait en 2008 une augmentation de 40 % des cas en 4 ans, puis une baisse relative. Mais une campagne de sensibilisation peut-elle empêcher le coup de poing, de pied, de feu de partir? Ne nous trompons pas d’objectif: il s’agit ici d’une campagne de mobilisation qui peut empêcher les voisins, les familles, les amis de se taire – pas les hommes de frapper. Il s’agit aussi d’un appel aux dons au travers d’une campagne 360º et du hashtag #jenesupportepaslesbleus.

La période actuelle d’excitation footballistique n’est a priori pas propice à ce type de communication. Mais c’est une caisse de résonance extraordinaire (un instrument dont Buzzman joue en virtuose). L’occasion était trop belle en effet pour marquer les esprits. Et ce ne sera pas la première fois que le foot servira à porter un message : tout le monde se souvient du « black, blanc, beur » de la France de 1998.

Prendre la parole dans cette atmosphère de liesse et d’effervescence où tout un pays est derrière son équipe avec le slogan “Je ne supporte pas les bleus“ s’est imposé comme une évidence. Le double sens du message donne toute sa force à la campagne qui a pour but d’interpeller l’opinion publique sur un sujet aussi grave que tabou. »  confie Helmi, le réalisateur.

Voilà ce qui s’appelle dribbler le beauf avec classe pour atteindre son but. On peut applaudir l’artiste. Rarement une campagne de sensibilisation aura eu autant d’écho.

Screen Shot 2016-06-08 at 21.11.30Mais surtout, le timing n’est pas innocent.  « Femme battue, rime avec coupe du monde » chantait Doc Gyneco. C’est statistique : 10 femmes mourront sous les coups de leur partenaire durant l’Euro 2016 en France. Matchs passionnés, testostérone déchaînée et canettes de bière en série vont malheureusement particulièrement bien avec la planète foot. C’est la raison pour laquelle, loin du jeu de mots, c’est la prise de parole de certains footballeurs qui est intéressante. Parce qu’ils aiment les Bleus, parce qu’ils sont les Bleus, ils ne supportent pas les bleus. Ils ne veulent pas être, même indirectement, responsables du moindre bleu. C’est l’honneur du football qui est en jeu. On peut se demander si la campagne n’aurait pas été plus efficace si elle s’était concentrée sur les footballeurs, mais dans tous les cas, l’impact est là – y compris l’impact coloriel d’une direction artistique soignée et d’une typo du taggeur Tyrsa –

Sur ce, on y croit! Et, « Allez, les Bleus… Allez, les Bleus… »

JeNeSupportepaslesbleus

Qui a fait quoi ?
Réalisateur : Helmi
Production : Division
Producteurs : Clémence Cuvelier et Jules Chateleux
Assistant réalisateur : Arthur Revon
Relations publiques : Léa Revon
Agence : Buzzman
Président, directeur de la création : Georges Mohamed Cherif
Directeur artistique : Philippe Boucheron
Concepteur Rédacteur : Patrice Lucet
Assistant directeur artistique : Romain Touzé
Responsable agence : Laura Seror
Production TV : Margaux Despointes, Eva Yung
Production Print : Dee Perryman
Responsable communication et PR : Amélie Juillet, Clara Bascoul Gauthier
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