Une petite campagne un peu bateau

On aurait pu dire des photos de la nouvelle campagne qu’elles sont jolies, comme les couleurs et le stylisme. La DA est incontestablement très réussie. On aurait pu, donc. S’il s’agissait seulement d’une campagne pour vêtements d’enfant, et pas d’annonces Petit Bateau, signées BETC. Parce qu’alors on attend un peu plus. Avec les meilleurs, on est exigeant, forcément.160216_PB_Bus_Shelter_FRDepuis 1996 BETC a mené la marque Petit Bateau aux sommets des podiums. Démarrant en fanfare avec le slogan « A quoi ça sert d’imaginer des vêtements si on peut rien faire dedans !» et un film rythmé par le réjouissant « Fais pas ci pas fais pas ça » de Dutronc. Une grande campagne parce que partant d’une idée juste: un enfant a besoin de vêtements solides pour faire des bêtises.

Déjà grand prix APPM en 2002 puis en 2004, Petit Bateau et BETC gagnent à nouveau en 2008 avec la campagne « des mois » basée sur un constat tout aussi juste : les tee shirts petits bateau sont portés par des enfant 18 à 924 mois et sont particulièrement appréciés nos copines (quel que soit leur sexe).

Petit Bateau, les mois

Et la marque garde le cap transgénérationnel jusqu’à aujourd’hui. Car aujourd’hui, elle décide de se recentrer sur son cœur de cible : les enfants. Un recentrage souligné par la nouvelle signature : « Pour les enfants, les vrais » (des fois qu’il y en aurait des faux).

Pourquoi ce changement et pourquoi nous asséner une telle évidence ? Pour attaquer l’international, voyons ! Car à l’étranger la notoriété de la marque est loin d’être aussi importante. Petit Bateau fait des vêtements pour enfants, la version anglaise « for serious kids » nous le dit bien (et mieux). Car elle s’appuie sur le sens anglais de « serious », qui veut dire « qui se donne à fond ». Au match Anglais-Français, la baseline gagne haut la main. Le prix à payer sans doute pour une bonne communication internationale où Petit Bateau fait 60% de son chiffre.

Venons-en maintenant aux annonces.

Elles sont évidemment déclinées du film. L’univers de ce dernier serait une usine de vêtements Petit Bateau fantasmée par un enfant, une usine « sortie de son propre cerveau »… enfin plutôt du cerveau d’un adulte qui fantasme l’enfance. Car dans cette usine de carton et bouts de ficelle qu’ont dirait conçue par Gondry ou le studio Aardman, le digital est totalement absent.

Les annonces nous montrent donc des enfants comme on les aimeraient : débordant d’imagination, de créativité et capables de fabriquer des magnifiques masques en cartons pour s’envoler dans des mondes fabuleux… brefs de purs fantasmes alors qu’on sait bien que les nôtres, les vrais, sont collés derrières leurs écrans et sont devenus incapables de se servir de ciseaux, ces outils du crétacé inférieur.

L'enfant rêvé.
L’enfant rêvé.

On flatte, ça n’est pas grave. C’est de la pub. On peut comprendre aussi qu’en ces temps inquiets et souvent déprimants, on ait envie de croire que nos rêves de couleurs et de fantaisie sont aussi ceux de nos enfants.

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2 réflexions au sujet de “Une petite campagne un peu bateau”

  1. Que cette campagne réponde à un besoin, je ne le nie pas et c’est même ce que je laisse entendre en conclusion. Néanmoins, les grandes campagnes Petit Bateau prenaient appuis sur de vrais insights ce qui leur donnaient plus de force. Ici, même si le résultat est joli, on évite de se confronter au réel, c’est pourquoi à mon sens on est moins fort. Mais l’heure n’est semble-t-il plus guère au risque dans le communication.

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