L’AACC, le fond ou la forme ?

Les ennuis, c’est comme le papier hygiénique, on en tire un, il en vient dix. Woody Allen

J’ai des questions, L’AACC a les réponses.

L’accueil de Marie-Pierre Bordet, la Vice-Présidente de l’AACC, est plutôt froid. Pourtant notre discussion téléphonique a le mérite de démêler la pelote de nos doutes. Elle commence par me dire que l’AACC n’est pas d’accord avec « le fond » du Jour Sans Pub.
Tiens, ce sont les mêmes mots employés par l’UDA. Ça fait des mois que nous nous creusons les méninges pour essayer de comprendre ce qu’ils entendent par « fond ». On va enfin le savoir !

La vice-présidente s’explique : « Vous ne pourrez pas couvrir tout Paris avec votre événement puisqu’il n’y aura jamais l’unanimité. À côté des annonceurs qui se taisent, il y aura aussi des annonceurs qui communiquent. »

Mais non, la couverture sera très importante. Nous avons déjà les affiches de la ville de Paris, les quais de gares, les bus, les affiches grand format et beaucoup de partenaires. et, si les Associations ne nous mettent pas des bâtons dans les roues, même le réseau du métro. Sans compter la radio, la télé, les journaux, le cinéma, les événements…

Et puis, sincèrement, je ne crois pas que, ce jour-là, il y aura beaucoup d’annonceurs qui vont se bousculer au portillon. Il faudrait être suicidaire pour afficher sa pub pendant le Jour Sans Pub !

Bonjour, c’est moi l’annonceur pollueur.

Vous imaginez, vous, la grosse affiche avec méga-logo, qui trône parmi des Chut… discrets. Autrement dit : Bonjour, c’est moi l’annonceur pollueur. Je ne vous respecte pas, je ne veux pas dialoguer avec vous et je vous emmerde ! Les pollueurs feront profil bas. Donc voilà éliminé le problème de fond de l’AACC.

« Pendant  la journée sans voiture, il y a beaucoup de gens qui utilisent leur véhicule »,  rétorque Marie-Pierre Bordet.
Certes, mais comparer la journée sans voiture au jour sans pub, c’est ne pas voir plus loin que son nom. Ce n’est pas parce qu’il y a un « sans » dedans que le résultat sera le même. La journée sans voiture, tout comme la journée sans tabac, sans achats… servent à donner une vague prise de conscience qui disparaît à minuit pile. Ce sont des rendez-vous ponctuels qui s’achèvent le jour même. Tandis que Le jour sans pub prépare le lendemain de la pub. Et le surlendemain et les jours suivants. Le jour sans pub c’est le jour sans fin.

Affiches le Jour sans pub

Privé de dessert.

Je pensais que les gens de la profession auraient été assez intelligents pour ne pas s’arrêter au nom. Ils auraient étudié l’action sous toutes ses facettes. Erreur ! Le « sans », adverbe privatif, sonne à certaines oreilles comme une dépossession, une punition.
Souvenirs d’enfance ? Privé de dessert et hop, au lit tout de suite ! Pourtant il suffit de réfléchir pour réaliser qu’une journée de dialogue est bien plus profitable qu’un jour de publicité.

Au lieu du « jour sans » j’aurais du l’appeler « le jour avec ». Avec les consommateurs, avec les marques, avec les publicitaires. Le jour où tout le monde est gagnant. Mais tant pis, c’est trop tard pour changer. Ce nom est comme un vieux chewing-gum qui me colle aux semelles.

Marie-Pierre Bordet continue de m’expliquer les raisons de leur opposition : « En tout cas si vous étiez le Ministère du consommateur ou une association… » Raté ! « Nous sommes  AUSSI une association de consommateurs. » Le conseil de l’Eminence grise de me constituer en association était bien vu.

Elle a l’air étonnée : « Ah, ce n’est pas ce que j’avais compris, je croyais que vous étiez créative. »

Pourquoi cette habitude française de tout vouloir mettre dans des tiroirs ? Tiroir blanc ou tiroir noir. Eh bien, moi je suis tiroir bi. « L’un n’empêche pas l’autre. Je suis directrice de la création et Présidente d’une association de consommateurs. »

A trop réfléchir, on oublie d’agir.

La Vice-Présidente enchaîne : « Nous et l’UDA, nous faisons un travail de fond depuis longtemps et nous réfléchissons aux problèmes de la pub… » Oui, c’est tout à fait vrai. Le problème c’est qu’à trop réfléchir, on oublie d’agir.

J’insiste : « Bien sûr, c’est important de travailler en profondeur, d’établir des règles, de réfléchir, de conseiller, mais ce n’est pas en limant un angle par-ci et par-là qu’on va métamorphoser la pub et inverser la tendance. Pourquoi refusez-vous d’échanger ? Nous avons le même combat et en parler pourrait nous faire avancer réciproquement. »

Mais si le combat est le même, les armes ne le sont pas. l’AACC et l’UDA avancent en vase clos, en parlant entre eux, en montant des commissions d’experts. Moi, je veux entendre la voix des vraies gens. Pour eux le consommateur doit rester spectateur. Moi, je pense qu’il doit devenir acteur. Eux, ils réparent les brèches au fur et à mesure qu’elles se présentent. Moi, je veux reconstruire un beau bateau flamboyant qui avance poussé par un souffle novateur. Ils nous reprochent le fond, mais, en réalité, ce qui les effraye c’est la forme. Pourtant les années passent et le bateau continue à prendre l’eau. Combien de temps reste-t-il avant qu’il coule ?

J’ajoute « Avez-vous lu la dernière enquête d’Australie ? La tendance antipub a encore augmenté. Ne pensez-vous pas qu’il est temps d’agir ? »

Dans ce climat morose, nous marchons sur des œufs

Elle répond gentiment, mais fermement : « Nous avons déjà notre programme et nous nous y tenons. Dans ce climat morose, nous marchons sur des œufs et nous ne voulons pas prendre des risques. »

Le dernier mot a une sonorité râpeuse. Ah, dur d’avoir une idée courageuse dans ce monde grelottant et pétrifié. Difficile d’innover quand on n’ose pas bousculer les habitudes. Et ce n’est pas aujourd’hui qu’on donnera le pouvoir à l’imagination.

Je lance ma dernière phrase, comme une bouteille à la mer : « Mais le plus grand risque, c’est de ne pas prendre des risques ! »

Marie-Pierre Bordet conclut « Si le dossier a changé, je veux bien l’examiner… Si  l’UDA n’est pas opposée ou s’il y a un engouement, je veux bien revoir ma position. Mais ça m’étonnerait. J’ai vu M. Gérard Noël y a deux jours, nous en avons encore parlé et il nous a confirmé qu’il est contre. Au fait, le Jour Sans Pub est pour quand ? »

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16 réflexions au sujet de “L’AACC, le fond ou la forme ?”

  1. Il me semble très clair que l’AACC n’a pas de raisons valables pour s’opposer et rame pour en trouver. Je crois que leur décision est prise d’avance. Pourquoi ? Vous avez tout compris, vous avez de l’audace, des idées, vous avancez et vous savez communiquer. Quand on est trop bon on fait des jaloux 🙂

  2. Je pense que cette association est très "politique". Elle se conforme aux demandes des ministres, des politiciens et des autres associations. Elle bouge en fonction de leurs attentes et elle bien loin de s’intéresser à ce qui pense le consommateur. Ce n’est pas la peine de perdre du temps, autant vous adresser directement aux politiciens.

  3. Ces institutions sont bien cloîtrées dans leur petit monde étriqué et pensent qu’en dehors d’eux, personne n’a le droit de réfléchir, de faire de bonnes propositions et de résoudre les problèmes qui concernent la publicité.
    Elles ne veulent pas prendre en compte d’autres points de vue car cela les obligerait à se remettre en question. C’est bien pour cela qu’elles vous ressortent leurs clichés monotones et accablants, complètement décalés de la réalité. Il ne suffit pas de surfer sur la vague vert-ethique-responsable pour reconquérir le consommateur, il ne suffit pas d’appliquer des changements qui sont plus une obligation qu’une réelle conviction et qui ne nous touchent pas profondément. Nous ne sommes pas dupes, même s’ils sont champions dans l’art d’accommoder les restes et de faire du neuf avec du vieux, tout ça ne reste que des vieilles recettes. Ils sont bien éloignés de nos besoins de dialogue et de considération. A bon entendeurs !!!

  4. Elles vous donnent des leçons, mas elles m’ont l’air l’air complètement à la ramasse. Comment ne pas comprendre qu’un changement radical s’est produit ? Cela leur donne bonne conscience de faire semblant d’être dans le coup, mais leur discours et leurs nouvelles règles ne résoudront jamais le problème de fond : la perte de confiance du français qui a besoin d’être écouté et valorisé en tant qu’être humain à part entière. Si les associations pensent pouvoir continuer à manipuler le consommateur comme avant, elles vont tout droit dans le mur et elles sont bien perties pour atteindre le point de non-retour.

  5. Alors là ! Bravo ! C’est à peu près la meilleure synthèse que j’ai pu lire depuis longtemps sur le foutage de gueule et la supercherie. Je ne parle pas de cet article, mais de la manipulation publicitaire en général.
    Encore Bravo !
    Ça prouve en tout cas une chose chère Madame, c’est que les gens sont vraiment très cons et qu’il y aura toujours un ( une en l’occurrence ! ) marchand pour leur refiler un produit de merde !
    La pub a encore de beaux jours devant elle si j’en crois ce que je vois.

  6. Un blog c’est un lieu d’échange et de dialogue où l’on peut débattre autour d’un sujet et donner son point de vue.
    Je suis ce blog depuis son démarrage, croyez-moi avec le plus grand intérêt. Vous réfléchissez à la nouvelle attitude du consommateur, aux problèmes de la publicité et vous cherchez des solutions positives. Vous touchez avec brio et intelligence à un sujet actuel assez épineux.
    Je trouve que vos lecteurs y apportent des réflexions ou des suggestions fort enrichissantes. (on a les lecteurs qu’on mérite ?)
    Je viens de lire avec effarement le commentaire de M. Devarieux. Ce monsieur n’a pas suivi le sujet, il ne nous apporte rien et ses affirmations sont parfaitement arbitraires. Il est clair qu’il a été touche de près par votre dernier billet, mais au lieu de développer son point de vue ou de préciser ce qu’il le dérange, il glisse quelques mots grossiers, il vous agresse et nous traite de c… Vous avez raison de ne pas le censurer. Il fait tache et il est là pour nous rappeler qu’il existe aussi des gens mesquins, sans aucune ouverture et incapables de dialoguer.

  7. surtout, ne pas se décourager.
    Et est-ce que tu as contacté le BVP ? A priori cette représentante de l’AACC dit qu’elle réfléchit avec l’UDA aux problèmes de la pub, mais le BVP aussi et à mon avis serait plutôt du côté du JSP, non ?
    Bon courage !

  8. FBI le JSP… ?
    Fausse bonne idée peut être que le jour sans pub ou alors le jour sans pub sans com sans prise de conscience, s’il fallait faire un jour sans pub ce serait de s’adresser au ministère de la sante de la culture et de la com réunit et d’interdire officiellement toute communication sur les 4×3 en effet il faudrait que tout devienne vierge le jour "j"or ce ne sera jamais le cas chacun récupérera qui l’idée qui l’origine l’initiative de…De même ne pas devenir non plus des antipub des antis antipub on est en démocratie…Mais trouver des alternatives, développer des nouveaux modes de communication basée sur l’action sur l’importance du capital humain serait peut être beaucoup plus efficace et fédérateur et cela mettrait le doigt d’une façon beaucoup plus pensée sur le problème de la saturation…Tout en faisant pour le coup prendre conscience aux annonceurs l’interêt qui se feraient une joie d’y participer

  9. salut Emmanuel, je ne comprend pas pourquoi tu parles d’anti-pubs. Le JSP c’est tout son contraire. J’en ai assez des extremistes qui ralent et attaquent sans chercher un point d’entente.
    Babette aime la pub, ça se sent et elle ne veut pas la casser, mais la rendre plus intelligente. Ca, moi ça me plait bien. Le JSP sert, exactement comme tu dis, à « trouver des alternatives, développer des nouveaux modes de communication basée sur l’action et sur l’importance du capital humain. » Tu proposes d’interdire officiellement toute communication sur les 4×3. Pourquoi vouloir toujours infantiliser les gens ? Nous sommes plus que saturés, mais si les marques et la pub von finir par comprendre et se responsabiliser ce sera bien pmieux qu’une intervention du gouvernement. Ce que j’aime dans le JSP c’est qu’il ne combat rien, n’interdit rien et il ne porte pas de jugement, mais il essaie de mettre en relation des gens qui ne se parlent jamais et qui ont du mal à se comprendre. Babette veut ouvrir un dialogue entre les marques, la pub et le consommateur. A l’occurrence le consommateur c’est moi et moi ça me plait qu’on me traite comme une personne à part entière et pas uniquement comme un imbécile qu’il faut manipuler et pousser à la consommation. T’as vu la création dans l’onglet crea ? Le Chut… dit "fermez-la deux minutes et écoutez-nous".
    Puis agissez en conséquence.
    Tu dis qu’il y aura de la recuperation et tu as raison. Personellement je m’en fous puisque du moment que cet événement peut changer l’essentiel. Cordialement;-) pierre

  10. Salut Pierre oui et non…Avec ton analyse que je partage qu’à moitié je ne suis pas anti pub ne le serait jamais,quand j’ai évoqué le mot d’antipub c’était plus d’une façon globale mais aucunement je ne visais le jsp,curieux quand même qu’il faille se justifier après chaque post sans doute le médium blog ne s’y prête pas ou alors j’écris comme un cochon…;)Bref..Ok sur le fait qu’il faille trouver un point d’entente sans pour cela tagger a droite à gauche de façon violente…En revanche je ne vois pas ou est l’infantilisation dont tu parles moi j’y vois plutôt une respiration un choc…Le matin tu te léve et rien! aucun mot aucun messages aucun signes aucunes lettre rien! Là ce choc de retrouver l’environnement vierge ferait prendre conscience de qqch ou du moins de qqch qui semble bouger et moi ça me dérange et je ne m’en fou pas de la récup car on retombe dans le même shéma et a terme c’est kiff kiff…Je pense qu’en matiére de créa JSP peux faire bcp mieux et c’est pas les créatifs qui manquent…Pareil en radio plutôt que d’emettre un message, si l’on mettait le bruit du vent dans des branches sans autre messages cela serait bcp plus impactant que de "dire" …C’est simplement mon avis…Cordialement:) Emmanuel

  11. Oui, Emannuel, ce n’est pas simple de synthetiser en quelques mots et de façon claire un discours qui meriterait d’être longuement developpé.
    je suis parfaitement d’accord avec toi sur le choc visuel. L’impact de cette journée sera sûrement exceptionnel. Le bruit dans le branches etc…, c’est aussi très sympa. Si je me souviens bien, Babette l’avait envisagé ou alors c’était la mer, le vent, les oiseaux, quelque chose dans le style nature vierge.
    Le seul point qui me laisse perplexe c’est ta proposition de faire intervenir les politiciens pour interdire officiellement toute communication sur les 4×3.
    Ce serait dommage d’en arriver là. Je prefere de loin une prise de conscience de la part de la pub, des marques et des médias, qui décideraient de faire un geste pour le consommateur pendant 24 heures et de ne pas afficher. Si c’est eux qui le font, c’est qu’ils ont compris et qu’ils adoptent une attitude adulte et responsable. Si on leur impose, ils obeiront mais sans aucune prise de conscience. Je considere qu’un decret ministeriel ne peut que deresponsabilise et infantilise les gens. Mais évidemment, si on n’a pas le choix.

  12. L’intervention d’un ministère peut resoudre ce que l’AACC appelle le problème de fond. Je suis d’accord avec Pierre, une prise de conscience est bien plus interessante qu’une imposition du haut, mais Emannuel a raison quand il propose de demander aux politiciens d’intervenir, étant donné qu’il n’y a pas beaucoup de gens qui font preuve de maturité et l’AACC qui meprise les non-puissants et s’ecrase devant les tout puissants se mettra à quatre pattes devant les politiciens.

  13. Je comprends la reaction de Gabriel Devarieux.
    Il n’a pas confiance dans les publicitaires et il pense qu’ils sont tous des manipulateur qui veulent nous rouler dans la farine. La plus part des publicitaires sont comme ça:)
    Moi aussi au depart j’etais mefiante.
    C’est en suivant votre blog que j’ai compris que vous aimez la publicité et vous ne crachez pas sur les consommateurs :))
    Avec le JSP pour la première fois tout le monde sera gagnant:)

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