Be love, more love

Jésus de retour sur terre s’étonnerait qu’on le commente tant et qu’on essaie si peu de l’imiter. Jacques de Bourbon Busset

belove

 

Le 6 avril, la marque de préservatifs BE LOVE affiche des cupidons qui attaquent à coups de flèches les propos du pape sur le préservatif. Trois jours après, la campagne est retirée. Que s’est-il passé entre temps ?

Un véritable raz-de-marée. Les membres de la Communauté Catholique ont considéré que la campagne était diffamatoire et discriminatoire envers l’Eglise et le pape. Les blogs catholiques se sont relayés pour diffuser l’info.

Unitas, un réseau de chrétiens engagés a contribué à accélérer le tam-tam virtuel en demandant d’envoyer un mail de protestation à l’annonceur et à l’agence de pub. Le buzz a marché à tout va et BE LOVE et Léo Burnett ont reçu 1 courriel de protestation à la minute dont certains très hostiles, voire de nature insultante et menaçante.

Certains blogs invitaient même à mettre à la poubelle le plus grand nombre de journaux reproduisant la campagne. Et aussi à souiller ou à détruire les affiches. Bien évidemment, personne ne s’attendait à une réaction du type « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font », même si ça tombait pile poil. Jésus a prononcé ces paroles sur la Croix exactement le même jour, un Vendredi saint.

On ne m’attendait pas non plus à un « Tends l’autre joue ». Pourtant s’il y a une religion qui a changé la loi du talion en invitant à oublier le fameux « Oeil pour oeil, dent pour dent » de l’Ancien Testament c’est bien la religion catholique. J’y ai baigné dedans et je peux vous assurer que c’est bien elle qui vous apprend que ne pas riposter confère une puissance capable de désarçonner l’adversaire. Et là, vlan ! Les Catholiques renvoient direct la soi-disante baffe reçue et ils poussent les autres à riposter par la violence. Mince, je vais finir par perdre toutes mes références !

Le même blog incite tous ses frères et sœurs catholiques à éviter la marque BE LOVE lors de l’utilisation du préservatif. Le préservatif ? Ah bon ? Je croyais que le pape leur avait dit que le moyen le plus sûr et le plus noble restait la fidélité et l’abstinence ! Alors, les amis, on écoute son pape ou l’on ne l’écoute pas ?

Parmi les critiques, il y en a aussi qui ont accusé BE LOVE de gagner de l’argent. Il n’y a pas de mal à ça ! Une entreprise commerciale qui propose des préservatifs à 20 centimes la pièce pour les mettre à la portée du plus grand nombre, ça me semble très correct. Quand on voit le prix unitaire auquel l’Église, qui n’est pas, elle, une entreprise commerciale, vend ses cierges, je me dis qu’elle est mal placée pour mépriser toute démarche mercantile.

Bien évidemment on est dans la tendance « retour vers le passé ». Et les supporters du pape cherchent à attaquer par tous les moyens. Et on arrive aux dérives. Si je peux comprendre que les catholiques réagissent parce qu’on touche à leur chef spirituel, si je peux respecter leurs sentiments, je trouve pas catho du tout de réagir de la sorte. Certains ont même accusé BE LOVE de « commerce mortifère ». « Que serait Be Love sans les séropositifs ? Be Love a besoin des séropositifs pour alimenter la peur première qui provoque l’achat du préservatif. Sans les séropositifs, Be Love n’est plus rien. Be Love fait ses bénéfices sur le malheur des autres, et notamment sur l’extrême gravité du Sida. Quoi de plus honteux ? Toutes les associations humanitaires ne pourront pas cacher le commerce mortifère qui se noue bien souvent à leur insu. 

N’importe quoi ! C’est tellement petit que réagir serait donner trop d’importance à des propos gratuits, bêtes et méchants. En tout cas, je ne suis pas là pour émettre des jugements moraux ni pour soulever la polémique, même s’il y en a certains qui mériteraient bien qu’on leur vole dans les plumes. Je reviens à mon sujet : la pub.

La pub et les tabous, j’en ai déjà débattu en long, large et en travers. La religion fait partie des plus importants tabous et elle est à prendre avec des pincettes. Quelle que soit la religion, elle touche les sentiments et l’univers personnel des individus et de vives réactions critiques peuvent exploser à tout moment. Une pub touchant à la religion peut vite être ressentie comme un manque de respect, un outrage, presque une profanation. Et quand le sexe côtoie l’église et vise son chef spirituel, ça tourne au scandale, à la limite du blasphème.

Depuis toujours, dans la pub, la pression des groupes religieux est importante et a été rarement ignorée. Aux USA, au début des années 1980, l’un des plus gros annonceurs au monde, le superpuissant Procter & Gamble a été contraint de retirer sa pub d’une cinquantaine d’émissions jugées inacceptables par un mouvement de pression religieux qui incitait au boycottage.

Mais comme j’expliquais dans « La pub c’est l’enfer » les attitudes bougent en fonctions des réalités du moment, du pays et de la subjectivité des gens. Il est vrai aussi qu’il y a quelques années, à Montréal, le pape Jean-Paul II apparaissait dans une pub pour une maison de relations publiques. Il bénissait, la main levée, des revues spécialisées. L’accroche ? « Ceux qui croient au pouvoir des relations publiques lèvent la main ».

Et même les religions officielles utilisent la publicité pour atteindre certains de leurs objectifs. Dans certains pays, les églises font de plus en plus appel aux publicitaires professionnels.

Au Québec, l’église a donné son budget à la plus grande agence de publicité canadienne, pour créer une affiche en vue de recruter des jeunes hommes pour la prêtrise. L’affiche montrait une tête de Christ avec l’accroche : « Il ne travaillait pas à temps partiel.» Néanmoins, devant une telle pression et suite à un entretien avec Pierre-Marie de Berny, président d’Unitas, BE LOVE et Leo Burnett ont fini par faire marche en arrière. Le « mea culpa » n’a pas tardé : « Notre objectif n’ayant jamais consisté, de près ou de loin, à manquer de respect envers sa Sainteté Benoît XVI et les fidèles de l’Église Catholique, à choquer quiconque ni attiser les oppositions entre les citoyens de ce pays. Le seul propos a été de se positionner sur le débat et de promouvoir l’usage du préservatif pour préserver la vie

Tout en précisant que leur décision est une marque de respect et d’amour pour les gens, quels que soient leurs croyances religieuses, politiques, leurs origines raciales ou nationales, leur âge ou leur milieu social, Be love a confirmé que l’usage du préservatif reste le moyen de protection le plus sûr à ce jour contre le risque de transmission du VIH-Sida pour celles et ceux qui ont choisi d’avoir des relations sexuelles. Et voilà que depuis ce matin, l’accroche de la campagne a changé. Juste un « More love » sans aucune référence à Benoît XVI.

Les cathos se frottent les mains pour cette « belle victoire en Semaine Sainte ».

Peut-être même qu’ils commencent à réfléchir déjà au pouvoir des mass médias. Après les T-shirts et les badges avec : «Touche pas à mon Pape » pourquoi pas une 4X3, histoire de remonter un poil l’image de Benoît XVI ?

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10 réflexions au sujet de “Be love, more love”

  1. Quand j’étais petite, les bonnes soeurs m’avait donné un petit bouquin : ‘L’imitation de Jésus". Eh bien ça ne donnait pas du tout de devenir imitatrià ce, je laisse ça à Canteloup et à Laurent Gerra; Quant Jacques de Bourbon Busset (que j’ai bien connu) qui imitait-il?
    Benoit XVI?

  2. Même si évoquer l’abstinence ou la fidélité comme un moyen de lutte contre les maladies sexuellement transmissibles me semble logique de la part des cathos, il faut reconnaitre que les propos de Benoît XVI en Afrique étaient déplacées et honteux. Cette pub est une prise de position et une bonne réponse au Pape. Mais comme vous dites, il est délicat de toucher à la religion sans froisser des sensibilités et provoquer des fortes réactions.

  3. Je suis bien contente que cette campagne a été retirée. La prise de position de l’annonceur était agressive et réduisait l’être humain à l’instinct animal. Le Pape propose autre chose que de s’accoupler partout et avec tout le monde et il n’exclut pas le port du préservatif.

  4. "La prise de position de l’annonceur était agressive et réduisait l’être humain à l’instinct animal."

    C’est plutôt l’église qui essaie de réduire l’homme à un simple esprit pur en reniant complètement ses instincts et en faisant l’amalgame entre l’animal et le mal. Cette vision édulcorée de l’homme et du monde aboutit forcément à des raisonnements irresponsables malgré qu’ils soient pavés de bonnes intentions.

    Le Pape devrait se concentrer à promouvoir la vraie fidélité, celle qu’on choisi librement par amour et par sa propre volonté en maîtrisant ses instincts, au lieu de tenter de l’imposer de force par le biais d’une maladie mortelle privée de son antidote. Etre fidèle ce n’est pas la même chose que d’être résigné.

    Quant au retrait de la campagne, je trouve que c’est une atteinte à la liberté d’expression. Quand l’église dit des choses scandaleuses on la critique mais on ne lui mets pas une muselière.

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